Dévoiler la non-religion : Le cas du véganisme éthique

Dans un verdict juridique historique, le véganisme éthique est reconnu comme une croyance philosophique distincte de la religion. Cette décision révolutionnaire incite à une exploration critique de l'intersection de l'éthique, de la non-religion et du droit dans la société contemporaine, redéfinissant nos perspectives sur les systèmes de croyances.

Lauren Strumos
Lauren Strumos
Exploration de l'intersection du droit, de l'éthique et du véganisme dans une scène de tribunal. Image de Politics and Rights Review.

Le concept de non-religion reste largement un territoire inexploré dans les discussions juridiques concernant les droits de l'homme et la discrimination. L'affaire de Jordi Casamitjana au Royaume-Uni constitue un moment décisif dans ce domaine peu exploré. Casamitjana, un végétalien éthique, s'est retrouvé licencié de son emploi à la Ligue contre les sports cruels. Il prétendait que cette action constituait une forme de discrimination à l'encontre de ses convictions éthiques profondément ancrées.

Ce cas reposait sur sa divulgation des investissements de l'organisation dans des entreprises impliquées dans des tests sur les animaux, ce qu'il considérait comme contradictoire avec ses principes éthiques végétaliens. La décision ultérieure du tribunal de catégoriser le véganisme éthique comme une croyance philosophique, méritant une protection juridique en vertu de la Loi sur l'égalité de 2010, a des implications importantes. Ce jugement crée un précédent pour les végétaliens éthiques et initie un débat sur le statut légal des croyances qui ne sont pas religieuses.

Cet article vise à disséquer le milieu juridique et philosophique complexe mis en lumière par l'affaire «Casamitjana». Il explore comment la décision du Tribunal construit le véganisme éthique en tant que croyance philosophique, méritant ainsi les mêmes protections légales traditionnellement accordées aux croyances religieuses. Cette exploration remet en question les paradigmes conventionnels sur ce qui qualifie un système de croyances digne de protection légale.

Explorer les subtilités de cette affaire révèle comment le véganisme éthique, lorsqu'il est construit comme un phénomène non religieux, perturbe les catégorisations légales et sociales établies. Cette perturbation invite à une compréhension plus nuancée de la non-religion dans le cadre du droit des droits de l'homme.

Définir le terrain : Le véganisme éthique et la non-religion

Pour naviguer dans le paysage complexe de cette discussion, il est crucial de comprendre d'abord les termes qui en constituent la base : le véganisme éthique et la non-religion. Le véganisme éthique va au-delà d'un choix alimentaire ; il est souvent défini comme une philosophie morale complète qui structure les relations quotidiennes entre les humains et les non-humains et s'étend à tous les aspects de la vie. Il se manifeste souvent par des choix de mode de vie qui vont au-delà de l'alimentation pour inclure les vêtements, les cosmétiques et même le type de travail dans lequel on s'engage.

Ethical veganism is not just an opinion or a lifestyle choice; it is a deeply held conviction that shapes one’s interactions with the world.

La non-religion, en revanche, n'est pas simplement l'absence de religion. C'est une catégorie complexe utilisée par les scientifiques sociaux pour indiquer diverses croyances, perspectives et pratiques qui sont situées par rapport à la religion tout en restant distinctes d'elle. Il est évident ce que la non-religion n'est pas (c'est-à-dire, la religion), mais le contenu de la non-religion, y compris les identités non religieuses, les croyances, les pratiques et les morales non religieuses, est un domaine récent d'intérêt universitaire.

La non-religion sert de lentille conceptuelle à travers laquelle nous pouvons examiner la complexité et la subtilité du véganisme éthique, qui peut être ou non conceptuellement lié à la religion. Par exemple, certaines personnes lient leur véganisme au principe de ahimsa, tel qu'on le trouve dans le jaïnisme, l'hindouisme ou le bouddhisme. Certains végétaliens éthiques sont athées et ne font aucune connexion entre leur véganisme et la religion.

Véganisme éthique : une croyance philosophique ou religieuse ?

La décision du Tribunal dans l'affaire Casamitjana repose sur une distinction cruciale : la catégorisation du véganisme éthique comme une croyance philosophique plutôt que religieuse. Cette distinction sert de pivot aux protections légales dont bénéficie désormais le véganisme éthique en vertu de la Loi sur l'égalité de 2010 du Royaume-Uni. L'analyse du Tribunal s'appuie sur le Code de pratique statutaire de l'emploi du Royaume-Uni, qui affirme qu'une croyance peut être philosophique si elle n'est pas religieuse. Ainsi, la religion sert de point de départ conceptuel à la compréhension du véganisme éthique par le Tribunal.

L'approche du Tribunal envers le véganisme éthique est double. Tout d'abord, il établit que le véganisme éthique n'est pas une croyance religieuse, rendant ainsi la religion pertinente pour sa construction en tant que croyance philosophique. Ensuite, il argumente que le véganisme éthique, en tant que croyance philosophique protégée, devrait bénéficier des mêmes protections légales que les croyances religieuses. Cette approche double place le véganisme éthique dans une relation complexe avec la religion, même s'il cherche à le distinguer des systèmes de croyances religieuses.

Cette conceptualisation du véganisme éthique en tant que croyance philosophique méritant une protection légale défie les notions traditionnelles de quelles croyances devraient être légalement protégées. Elle élargit les lois anti-discrimination pour englober des croyances qui ne sont pas religieuses. Cela contribue à approfondir notre compréhension des droits de l'homme dans des sociétés de plus en plus diverses.

L'affaire Casamitjana offre un aperçu fascinant de la manière dont le système juridique construit le concept du véganisme éthique par rapport à la religion. L'analyse du Tribunal sur le véganisme éthique en tant que croyance philosophique n'est pas une procédure juridique isolée. Elle fait partie d'un cadre juridique plus large, positionnant le véganisme éthique au sein d'un réseau complexe de connexions, impliquant des croyances religieuses et non religieuses.

Le véganisme éthique remet en question les notions traditionnelles de religion et de non-religion.

Ce cadre complexe structure méticuleusement et interconnecte les composants, guidé par l'accent mis par le Tribunal sur les principes moraux du véganisme. Son objectif général est d'incorporer le véganisme dans le cadre protecteur du Code de pratique statutaire de l'emploi, lui attribuant un caractère similaire à celui de la religion.

Ce cadre juridique n'est pas arbitraire ; au contraire, il tourne autour de l'accent mis par le Tribunal sur les valeurs éthiques associées au véganisme. Son objectif principal est d'intégrer le véganisme éthique dans les protections du Code, le comparant à une croyance quasi religieuse. Cette caractérisation découle de la qualité morale substantielle du véganisme éthique, le faisant passer d'une simple opinion ou point de vue à une croyance philosophique méritant une protection légale.

Conclusion

L'affaire Casamitjana offre un aperçu fascinant de la manière dont les acteurs sociaux et légaux construisent le véganisme éthique. Le Tribunal détermine que le poids moral du véganisme éthique de Casamitjana est similaire à celui de la religion, ce qui l'aide à atteindre le seuil légal d'une croyance philosophique. En d'autres termes, le véganisme éthique d'un individu est une croyance qui peut mériter une protection légale contre la discrimination, tout comme les croyances religieuses.

Le Tribunal situe le véganisme éthique par rapport à la religion, mais le maintient finalement distinct de la religion en tant que croyance philosophique. La religion sert de toile de fond conceptuelle dans cette affaire.

Pour cette raison, le véganisme éthique peut être considéré comme une forme de non-religion. Cela ne signifie pas que le véganisme éthique est, en réalité, non religieux ou même une croyance philosophique. Pour certaines personnes, leur identité en tant que végétaliens éthiques est intimement liée à leurs croyances religieuses. En revanche, ce cas démontre comment un phénomène qui n'est pas intrinsèquement (non) religieux peut être construit en droit comme une forme de non-religion.

Adapté d'un article académique pour un public plus large, sous licence  CC BY 4.0

NE MANQUEZ AUCUN ARTICLE

Nous ne spammons pas ! Lisez notre politique de confidentialité pour plus d'informations.

Partager cet article
Candidate au doctorat en Études Religieuses à l'Université d'Ottawa, Canada, spécialisé en Non-religion.